Le rôle des CSE dans la prévention des risques pour les salariés des entreprises et des sociétés prestataires

Depuis le 1er janvier 2020, le CSE, Comité Social et Economique, est venu remplacer les anciens représentants élus du personnel qui existaient (DP, CE et CHSCT) et a vu son rôle évoluer.

Nous allons nous intéresser spécifiquement ici au droit d’alerte des CSE pour la préservation de la santé, de la sécurité et des conditions de travail que cela concerne les salariés de l’entreprise comme ceux des sociétés extérieures qui interviennent dans ses locaux.

Cet article a été écrit avec l’appui de Maître Audrey Ferry, avocat au barreau de Lyon, expert en droit social.

LES PRÉROGATIVES DES CSE

Les attributions du CSE diffèrent en fonction de l’effectif de l’entreprise (plus ou moins de 50 salariés), et peuvent toujours être complétées par des accords collectifs de travail ou par usage.

Pour toutes les entreprises

La délégation du personnel au CSE est composée de l’employeur ou un représentant désigné par lui et un représentant du personnel siégeant au comité, et a pour rôle notamment de déclencher des enquêtes en cas d’atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché.

De la même manière tout représentant du personnel au CSE dispose d’un droit d’alerte en cas de danger grave et imminent pour la santé et la sécurité des salariés, ou en cas de risque grave pour la santé public ou l’environnement (par exemple s’agissant des produits ou procédés de fabrication).

Le donneur d’ordre, informé qu’une règle de sécurité (missions à risques, absence de PTI, dépassement durée maximale de travail…) n’est pas respectée sur le site, doit intervenir auprès de l’employeur du prestataire pour faire respecter cette règle. A défaut il pourrait engager sa responsabilité solidaire.

 

Pour les entreprises d’au moins 50 salariés

Le CSE des entreprises d’au moins 50 salariés reprend globalement les attributions de l’ancien CHSCT, et dispose en complément des attributions citées ci-dessus, de prérogatives supplémentaires en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail. En effet, le CSE doit procéder à l’analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs, notamment les femmes enceintes, ainsi que des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels.

ENJEUX

Les entreprises qui accueillent des salariés de sociétés extérieures, ont-elles aussi la responsabilité des personnels qui interviennent dans leurs locaux ?

Tout d’abord notons que l’entreprise utilisatrice (autrement dit le « donneur d’ordre ») doit afficher à l’entrée et à la sortie de ses locaux les noms et lieux de travail des membres des CSE des entreprises utilisatrices et extérieures, le nom du médecin du travail de l’entreprise utilisatrice et le lieu de l’infirmerie.

Depuis le 1er janvier 2018, l’article L. 2312-6 du Code du travail précise que les attributions du CSE s’exercent au profit des salariés de l’entreprise utilisatrice (y compris stagiaires, intérimaires…), ainsi qu’au profit des salariés d’entreprises extérieures qui, dans l’exercice de leur activité, ne sont pas placés sous la subordination directe de l’entreprise utilisatrice, pour leurs réclamations individuelles et collectives, intéressant les conditions d’exécution du travail qui relèvent du chef d’établissement utilisateur.

Plus particulièrement, le CSE de l’entreprise utilisatrice a une compétence générale s’agissant de la coordination des mesures de prévention. Les CSE des entreprises extérieures disposent d’une compétence plus restreinte, liée à l’opération à laquelle elles participent.

Le CSE, au regard de ses attributions, doit veiller à la santé et à la sécurité des travailleurs, analyser les situations à risques, et alerter l’employeur en cas de danger. Néanmoins, c’est à l’employeur que revient la responsabilité de prendre les mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité des salariés.

Maître Audrey Ferry

Avocat, expert en droit social

Les Comités Sociaux et Economiques de l’entreprise utilisatrice et des entreprises extérieures sont conviés et informés :

    • de la date de l’inspection commune préalable par les chefs des entreprises intéressées, dès qu’ils en ont connaissance et au plus tard trois jours avant qu’elle ait lieu. En cas d’urgence, ils sont informés sur le champ ;
    • de la date des inspections et réunions périodiques de coordination, au plus tard trois jours avant qu’elles aient lieu. En cas d’urgence, ils sont informés sur le champ ;
    • de toute situation de danger grave et imminent.

Le plan de prévention et ses mises à jour sont tenus à la disposition des CSE et leur sont communiqués à leur demande. Le CSE de chacune des entreprises peut s’il l’estime nécessaire, charger un ou plusieurs de leurs membres appartenant à la délégation du personnel de participer à l’inspection commune préalable et/ou aux inspections et réunions périodiques de coordination. Le cas échéant, les membres rendent un avis qui sera porté sur le plan de prévention.

LE PLAN DE PRÉVENTION DES RISQUES

L’employeur est le prestataire, mais le donneur d’ordre est responsable des conditions d’exécution du travail des salariés de l’entreprise prestataire au sein de ses locaux ou sur son site. Il veille à ce que les salariés respectent le règlement intérieur, les consignes générales, les règles de sécurité en vigueur, ainsi que le cas échéant la mise en œuvre du plan de prévention.

Le plan de prévention a pour objectif de renforcer la prévention des risques liés à l’intervention d’entreprises extérieures. Il est obligatoire dès lors qu’un contrat de sous-traitance de plus de 400h de travail par an est conclu ou en présence de travaux dangereux. 

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Il appartient au donneur d’ordre, d’assurer la coordination générale des mesures de prévention décidées et d’organiser des inspections et réunions périodiques de coordination dont la périodicité est préalablement définie.

Chaque entreprise est responsable de l’application des mesures nécessaires à la protection des travailleurs qu’elle emploie.

Schéma web-service

LA FAUTE INEXCUSABLE

En cas de non-respect du plan de prévention et des principes de sécurité : la reconnaissance de la faute inexcusable

Le caractère de faute inexcusable est reconnu à la double condition qu’il est établit que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en protéger.

Lorsque l’accident du travail ou la maladie professionnelle résulte du non-respect par l’employeur de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité, causant un homicide, une blessure par imprudence ou négligence, la responsabilité pénale de ce dernier peut, le cas échéant, être engagée. 

 

L’entreprise prestataire de services en tant qu’employeur de la victime reste responsable vis-à-vis de cette dernière de l’accident dont elle peut être victime chez l’entreprise cliente.

 

En cas de reconnaissance de faute inexcusable due à la faute de l’entreprise cliente, le prestataire peut cependant se retourner contre le véritable responsable, le donneur d’ordre qui n’aurait pas établi correctement le plan de prévention ou pris les mesures de coordination et de prévention qui s’imposent, afin de lui demander le remboursement de son préjudice qui pourrait correspondre aux indemnités versées à la victime ainsi que la réparation du coût financier de l’accident.

Néanmoins, l’entreprise ayant recours à un prestataire peut par une clause du contrat de prestation de service se dégager de sa responsabilité en cas d’accident du travail frappant les salariés intervenants. Même si l’accident trouve son origine dans le dysfonctionnement d’un équipement lui appartenant, cette disposition contractuelle est valide et l’exonère effectivement (Cass. 2e civ., 12 juill. 2012, no 11-19.564).

Ainsi, nous pouvons constater que le CSE de l’entreprise « utilisatrice »  peut contrôler et alerter sur des sujets relatifs notamment à  la santé, la sécurité, les conditions de travail et plus particulièrement à l’application du plan de prévention à l’égard de ses salariés mais aussi des salariés des sociétés extérieures qui effectuent des prestations au sein de ses locaux.

 

« L’entreprise utilisatrice ne doit donc pas estimer que la sécurité des salariés des entreprises extérieures n’est pas son affaire. »

Maître Audrey Ferry, avocat expert en droit social

Si vous avez besoin d’aide sur la réalisation de votre plan de prévention ou le suivi de son application, n’hésitez pas à nous contacter.